Samedi 27 avril, 5 heures du mat’, me voilà au départ de l’Ultra Beaujolais Villages Trail, un 50 miles sur mes terres. Pas de ricains aux dents longues sur la start list mais une poignée d’excellents coureurs parmi lesquelles l’invité de dernière minute le savoyard Ugo Ferrari, le tenant du titre le haut-savoyard Stéphane Deperraz, l’ancien vainqueur et désormais caladois Fred Desplanches ou encore le montdorien Stef Vinot et le doubiste Benoit Leclercq. Bref de quoi rendre la course palpitante et m’aider à approcher les 7h45 objectif avoué au départ.

Je suis plutôt serein ce matin malgré mon dossard n°1 et un tibia endolori depuis une semaine. Cet idiot a eu la bonne idée de caresser d’un peu trop près un banc en pierre lors d’une séance de renforcement musculaire… Heureusement les premières foulées seront rassurantes.

Nous voilà donc près de 200 traileurs à nous élancer sur ce parcours que je connais par coeur. Un peu normal puisque j’en suis à l’origine. Mais pour autant je crains un peu le départ en côte et les 500m de D+ qu’il faut s’enquiller jusqu’au Crêt David en tout juste 4 kilomètres. Un feu d’artifice nous accompagne sur le début de l’ascension puis nous nous enfonçons dans la nuit noire.

Au sommet me voilà seulement entouré d’Ugo et Stéphane et nous pouvons alors commencer à papoter sur les crêtes menant au col de la Croix Rosier. Ces deux là ont mangé à la maison hier et y ont passé la nuit, preuve qu’on mange et dort bien chez moi !

J’imprime le rythme, celui qui me semble être possible de tenir jusqu’au bout. On zappe le ravitaillement du 7ème km, négocions sans problème la descente parfois raide menant au ruisseau du Rosier tandis que le jour se lève. Malgré la fraîcheur je ne regrette pas mon choix de courir en short et débardeur. Les occasions de se refroidir sont plutôt rares dans le coin même si la pluie est annoncée dans la matinée.

J’attaque la montée à la madone du Perréon au côté d’Ugo. Stéphane est quelques mètres dernière nous alors que nous n’avons pas spécialement accéléré. Je n’ai pourtant pas l’impression d’être parti trop vite et pourtant il perd régulièrement du terrain sur nous. Ugo semble assez facile et trottine de partout tandis que je marche dans un ou deux passages plus raides. De la madone nous rejoignons la Sablière où nous sommes déjà passés et bifurquons cette fois en direction de la ferme Ste-Marie puis du Trou du Loup. Le parcours en montagnes russes nous offre de beaux panoramas et j’en profite pour faire le guide touristique pour Ugo en lui indiquant les Monts d’Or au loin, le Mont Brouilly tout près ou encore les montagnes d’Avenas non loin. Ugo me raconte alors ces exploits de jeunesse en VTT dans le village de Quincié que nous apercevons en bas.

La descente piégeuse à la source du Beaujolais se passe sans encombre et nous enchainons illico la montée vers la Place aux Filles. Je fais le tempo sur la partie basse qui se court bien mais suis un peu décroché à proximité du sommet lorsque j’opte pour la marche tandis qu’Ugo trottine encore et encore. Mais une petite accélération à proximité de la bascule me permet de recoller et c’est ensemble que nous filons vers Romarand, chez les copains Robin et Béné qui tiennent un ravitaillement. Nous y voilà en tout juste 2h30 après 28km de course.

Je retrouve Murielle, Marianne et Mamita qui se sont levées de bonne heure pour me suivre. On change les bidons, je chope de nouvelles barres (des maisons dont je vous parlerai prochainement) et nous voilà déjà repartis.

Pas de grosses bosses avant une dizaine de kilomètres, je sais que la partie qui arrive me convient bien. Mais une surprise (pas pour moi !) tout de même au 30ème km avec un tout droit dans la forêt bien casse-patte. J’annonce à Ugo qu’il va devoir marcher mais le bougre le prend comme un défi et attaque tambour battant le pétard. Pas d’inquiétude pour moi, je sais que je pourrai revenir une fois hissé tout en haut. Mais allez savoir comment, tandis que je grimpe les mains parfois sur les cuisses, parfois au sol pour m’aider et la tête baissée vers mes pieds je me retrouve sur une mauvaise trace. Je m’en rends compte bien vite car d’habitude ça grimpe moins longtemps ici… Bon si je coupe dans la forêt à droite, je devrais retrouver le parcours et Ugo. Je me lance alors mais point de chemin mais une jungle hostile dans laquelle je m’enfonce… Je commence à me traiter de tous les noms, m’écorche les cuisses, perds une lentille … Bref ça va mal ! Au bout de 5 minutes je retrouve mon chemin mais suis définitivement seul. Cette épisode m’a un peu coupé les jambes et il me faut un peu de temps pour me remobiliser et reprendre un rythme correct.

La pluie et le froid ont fait leur apparition et c’est bien emmitoufflée dans leur blouson que je retrouve la team family à la Croix de Bonnevay (je suis alors à un peu plus de 4 minutes d’Ugo mais crois à ce moment là que je suis beaucoup plus loin). Au passage je demande à Murielle de me préparer mes lunettes pour le prochain point car avec un oeil sans lentille c’est un peu compliqué même en terrain connu !

Au moment d’attaquer le Mont Soubran dré dans la forêt ma montre m’indique 11km/h de moyenne depuis le départ. Cela me rebooste un peu après l’épisode malheureux précédent et l’objectif temps fixé au départ est encore tout à fait réalisable. En terminant à 10,3km/h de moyenne, je serais comblé. Pour l’instant il faut se coltiner le terrible Soubran (894m). C’est très raide mais surtout c’est un bordel sans nom au milieu des arbres fraîchement coupés. Pas trop gênant dans l’ascension mais la descente est un vrai parcours du combattant. En résumé 2km pour monter et descendre, le tout en 20 minutes !

Je retrouve ensuite le GR et un passage beaucoup plus aisé où je peux à nouveau courir. Malheureusement pas autant que prévu car ma tête me dit par moment de marcher pour récupérer un peu. J’en profite pour bien m’alimenter et au passage au col de la Croix Marchampt je prends quelques instants pour me débarrasser de ma lentille restante et enfiler une paire de lunettes à ma vue. Ah ça va mieux quand même !

Je cours jusqu’au ravitaillement de la Haye de Barnoux que je rejoins après 4h25 de course (46km) toujours dans les clous pour atteindre l’objectif. Rituel habituel avec changement de bidons, nouvelles barres, quelques centilitres de St Yorre mais aussi du jambon qui me fait envie sur la table bien garnie du ravito. Ma puce malgré ses 2 ans est bien attentionnée et me tend des barres accompagnées d’un « tiens papa » plutôt sympathique. C’est pas pour autant que je traine ici, il reste 36km et encore pas mal de difficultés.

La descente de la Combe du Laveur dans laquelle je m’entraîne régulièrement me permet de remonter un peu la moyenne. Physiquement les jambes vont bien, pas la moindre courbature ni le moindre début de crampe à l’horizon. Mais c’est mentalement que ça devient dure. La longue montée vers le sommet de la Pyramide ne se passe pas comme prévue. J’ai répété plusieurs fois cette longue ascension pas trop raide de 6,5km à l’entraînement en trottinant tout le long. Mais là avec 5 heures de course dans les pattes, personne à l’horizon ni devant, ni derrière, j’ai un peu de mal. Je marche beaucoup trop et la moyenne dégringole inexorablement si bien qu’une fois arrivé tout en haut après 56′ minutes d’ascension et quelques rares moments de course je ne suis plus dans le bon timing. Je parviens malgré tout à relancer à 14-15km/h sur la piste forestière menant à la Ferme du Creux où se tient l’ultime ravitaillement (km 64 6h15).

Arrêt express, rituel barres/bidons et une tartine de pain au miel en extra avant de me lancer dans les 18kms restants sans un mètre de plat … Impossible de les faire en 1h30, la messe est dite, je sais que je vais finir 2ème, comme en 2011 et 2015. Je surveille régulièrement mes arrières mais personne à l’horizon et je peux négocier presque tranquillement le final. La tête n’y est plus et je marche donc beaucoup, même si j’essaie quand même de me motiver à courir. « Allez, jusqu’à l’arbre là-bas … allez pendant 30 secondes … allez jusqu’au croisement … » Malgré la faible allure les difficultés s’enchainent bien et la connaissance de la topographie est un gros avantage. Le point positif c’est que musculairement ça va encore vraiment bien et que je peux descendre assez vite. Je me fais donc plaisir le long du ruisseau de Fonzelle, dans la descente vers Montrichard et surtout dans la plongée vers mon village de Vaux en Beaujolais. Un peu moins lorsqu’il s’agit de se hisser au dessus de Montrichard au milieu des vignes, de monter vers le col du St Bonnet et son fameux passage avec corde ou d’arpenter la piste pourtant pas très raide de l’accrobranche du Failly.

Me voilà enfin dans les 100 marches d’escaliers menant à l’école de Vaux. Je passe devant la maison mais pas question de m’arrêter. J’ai envie de la terminer cette course même si j’ai mis un peu plus de temps que prévu et tout le monde m’attend en bas. Alors je savoure la dernière descente sur le Perréon et j’entend le speaker Christophe Dallery annoncer mon arrivée.

Une tape dans la main d’Eric Delavelle, le grand ordonnateur de l’UBVT et je passe sous l’arche en 8h14’30 ». Ugo m’attend depuis 30 minutes (!!!) et a déjà gouté aux fameuses patates-saucisson. Stéphane nous y rejoint 12 minutes plus tard et complète le podium.

Le bilan est contrasté entre le fait d’avoir pu courir aussi longtemps ce qui ne m’était pas arrivé depuis l’été 2017 et le fait de ne pas avoir tenu l’objectif temps fixé au départ. Je m’en veux un peu de ma sortie de route du 30ème kilomètre qui m’aura valu de perdre le contact avec Ugo et un peu de motivation. Il était bien plus fort que moi et je n’aurai pas pu le battre mais un mano a mano à distance raisonnable m’aurait sans doute permis de faire mieux. Mais avec des si … On tâchera de faire mieux les prochaines fois !

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